2- Qui a été transfiguré, le Christ ou les apôtres?
4- La « Nuée-Parole prononcée »
5- La Transfiguration est vision
6- L’obombration, centre de la Transfiguration
10- Transfiguration et Passion
11- « Nous sommes transfigurés »
12- La montée est un changement de modalité
14- La transfiguration: mystère de la prière
15- La transfiguration Icône première
16- Dieu lui-même fait resplendir en nos cœurs la connaissance de sa gloire
17- La frayeur due à la rencontre du divin
18- « et nous avons contemplé sa gloire » (Jn 1,14)
20- Transfiguration et Traversée
21- Transfiguration et Cantique des Cantiques
23- Transfiguration et Eucharistie
24- Conclusion: Transfiguration et vie spirituelle
Introduction
Cet événement – la Transfiguration – a lieu à un moment donné dans la vie du Christ et des apôtres surtout. Il en choisi trois et il les prend avec lui. Il va au sommet de la montagne et c’est là que des choses bien étranges se passent.
Pourquoi aborder cette question ? Tout simplement parce que c’est une question centrale de la foi chrétienne et pour la vie spirituelle. L’église orientale a toujours considéré que le mystère de la prière est contenu dans le mystère de la Transfiguration.
La position de l’occident, par exemple de St. Thomas d’Aquin aborde la question de la Transfiguration de manière objective, c’est à dire, il dira que le Christ a été réellement transfiguré, il est arrivé un changement objectif dans le Christ lui-même.
Tandis que chez les orientaux, par exemple les pères Grecs, le mystère de la Transfiguration est diffèrent, c’est le mystère de la transformation des apôtres qui sont désormais rendus capables de voir quelque chose qui existait depuis le début chez le Christ. Nous voyons donc la différence, chez les occidentaux c’est l’objet qui va être transfiguré tandis que chez les orientaux, c’est le sujet qui contemple le Christ qui va être transfiguré ou si vous voulez, sa capacité de voir va se transformer. C’est pour cela que l’église orientale a l’audace de dire que « tout le mystère de la prière est contenu dans la Transfiguration« , car le chemin de prière c’est le chemin de notre transformation jusqu’à être rendu capable de voir la divinité.
Dans le récit même de la Transfiguration nous avons différentes étapes et malheureusement nous sommes souvent retenus par les étapes « extérieures » oubliant ainsi la véritable Transfiguration. Les vêtements et le visage nous attirent! Mais en quoi cela nous avance de voir que le visage du Christ ainsi que ses vêtements sont devenus lumineux ? Ils ne sont pas le cœur de la Transfiguration, ils en sont comme l’écorce extérieure, par contre la substance est l’esprit de l’être humain qui s’uni à la divinité. Si nous voyons le corps du Christ transfiguré cela est bien, mais si nous voyons son âme c’est encore mieux, mais si nous voyons sa Divinité c’est bien plus intéressant! Il ne nous faut pas échanger la table substantielle de la Divinité pour les miettes des lumière créées.
Donc, quelle lumière les apôtres ont-ils vue et quelle lumière par conséquent sommes-nous appelés à voir?
Ce n’est pas un vêtement ni un visage – même s’ils sont éclairés par la lumière de Dieu – qu’ils voient! Ils contemplent la lumière incréée, c’est St. Grégoire de Palamas qui précisera cela. Donc c’est la lumière de la Nuée et de la Parole qui est le centre de l’événement.
En fait qu’est-ce qui se passe ? Cette lumière a toujours existé, Jésus est Dieu depuis le début de l’incarnation et sa chair, sa nature humaine est transfigurée dès le premier instant de son incarnation, mais les apôtres ne pouvaient pas la voir. La Vierge Marie elle le voit parce qu’elle a le cœur pur; pour elle il est transfiguré dès le début.
La Transfiguration c’est la vocation chrétienne, c’est voir Dieu (quand nous mourrons se sera trop tard). Dans le rite byzantin, après la Communion, on chante toujours: « nous avons vu la véritable Lumière». Quand vous communiez vous n’avez pas des apparitions, vous avez mieux que cela.
2- Qui a été transfiguré, le Christ ou les apôtres?[1]
Les Pères grecs disent que ce n’est pas le Christ qui est transfiguré mais les Apôtres qui sont rendus capables de voir ce qu’ils ne voyaient pas: la divinité du Christ! Voici une ébauche, les lignes générales sur lesquelles les Pères s’entendent à l’unanimité.
- Aucune transfiguration n’a eu lieu dans le Christ Lui-même, pour la simple raison que la «chair» du Christ a toujours été transfigurée. On ne trouvera aucune difficulté à admettre cette vérité fondamentale, si l’on croit à l’Incarnation du Logos, c’est-à-dire à son union à la «chair» sans confusion ni séparation, avec tout ce que cette union réelle et qui n’a rien d’un simulacre implique d’interpénétration des propriétés des deux natures, divine et humaine. En effet on ne réfléchit pas assez sur cette implication, et souvent tout en l’admettant abstraitement, on en parle d’une manière qui trahit un nestorianisme inconscient, c’est-à-dire comme s’il n’y eût pas d’union réelle. C’est ce qui explique l’ébahissement de beaucoup de ceux à qui l’on dit que la chair du Christ a été transfigurée dès le premier moment de l’Incarnation. Or, il est clair qu’une union réelle, physique, entre deux natures aura nécessairement pour effet une certaine participation de chaque nature aux propriétés de l’autre, chacune cependant préservant ses propriétés, du moment que c’est d’une « union» qu’il s’agit, et non d’un amalgame ou d’une absorption d’une nature par l’autre.
Voyons donc un peu ce qui s’est passé: du côté de la divinité, il y eut participation à l’humilité de la chair par l’éclipse temporaire, si j’ose ainsi parler, de la gloire de la divinité. Reste à savoir œ qui s’est passé du côté de la chair.
Parlant du charbon ardent dont le séraphin purifia les lèvres d’Isaïe, St Basile dit: «Puisque donc le charbon ardent est du feu demeurant dans la matière plus grossière et plus terrestre (car après que le flamboiement de la flamme a passé, la communion du feu avec la matière crasse s’appelle charbon ardent), il signifie peut-être bien la venue de Dieu dans la chair, Car, dit-il, ‘le Logos est devenu chair. Et la chair, recevant l’illumination de la divinité, est sensible selon le corporel, mais selon son union à Dieu est transparente et éclatante.»
Et St Grégoire de Nazianze: «II est appelé Christ à cause de la divinité, car elle est l’onction de son humanité, sanctifiant non par l’énergie comme elle le fait pour les autres christs, mais par la présence tout entière de Celui qui oint; et dont l’œuvre est que Celui qui oint s’entende dire homme, et celui qui est oint soit divinisé.»
Les divers effets de l’Incarnation, par elle-même et indépendamment de la Rédemption et de la Résurrection (la nécessité desquelles dans le dessein providentiel, n’est en aucune façon contestée par les Pères) sur la chair du Christ sont exprimés par eux, dans des endroits trop nombreux pour qu’il soit nécessaire de les citer, par les mots: «divinisation», «onction», «glorification», «illumination», «immortalisation», «enrichissement», «exaltation» etc. On ne s’étonnera donc pas, pour peu qu’on sache œ qu’est l’Incarnation, de voir plusieurs Pères déclarer explicitement, avec force, que la Transfiguration a eu lieu dès le premier instant de l’Incarnation.
Ainsi Origène nie avec insistance toute métamorphose dans le Logos, dans le texte même où il parle des « différentes formes du Logos », ce qui indique dans quel sens cette dernière expression doit être prise (à savoir le Logos a des formes différentes à cause de la différente capacité de chaque sujet): « Notre Dieu, quand Il s’est transfiguré montant sur une haute montagne, n’a pas comme le veulent Celse et ses semblables montré sa forme autre et de beaucoup supérieure à celle que voyaient ceux qui sont restés en bas et ne purent Le suivre jusqu’en haut. Car ceux d’en bas n’avaient pas des yeux capables de voir la Transfiguration du Logos en le glorieux et en ce qui est plus divin!«
Et André de Crète: « Lequel brilla sur la montagne d’une manière extraordinaire – non qu’II devînt plus brillant que Lui-même ou plus élevé, loin de là! mais Il était comme auparavant… «
Et St. Jean Damascène: « Et la chair est glorifiée en même temps qu’elle est tirée du néant à l’être, et la gloire de la divinité devient la gloire du corps aussi… Si donc le saint corps n’a jamais été sans participer à la gloire divine, mais par la suprême union selon l’hypostase s’est parfaitement enrichi de la gloire de divinité invisible, de façon à ce que la gloire du Logos et de la chair fût une et la même, cependant la gloire étant invisiblement présente au corps visible, s’est avérée invisible à ceux qui ne peuvent contenir les choses qui sont invisibles aux anges, à ceux qui sont captifs de la chair, Il se transfigure donc, non en assumant ce qu’II n’était pas, mais en manifestant ce qu’II était à ses propres disciples, ouvrant leurs yeux, et d’aveugles les rendant voyants. » Et ceux d’entre les Pères cités qui ne se réfèrent pas explicitement à cette transfiguration du Christ dès le premier moment de l’Incarnation, la supposent par la conception qu’ils ont de la Transfiguration, et dont nous allons tout de suite parler.
- Pour tous les Pères en effet, la Transfiguration est celle des disciples eux-mêmes, et consiste en une certaine perception mystique de la divinité du Christ à travers le voile de la chair. «Car la puissance divine, dit encore St Basile, a paru à travers le corps humain, comme une lumière à travers des membranes transparentes, brillante pour ceux qui ont les yeux du cœur purifiés.» Ce que les apôtres ont perçu est décrit comme étant «lumière»[2], «gloire»[3], «splendeur»[4], «beauté»[5], «divinité»[6], «forme»[7], «théophanie»[8], «puissance»[9]. Certains vont même décrire, parfois un peu en détail les stades menant à la vision de Dieu en cette vie et par lesquels les apôtres ont passé: purification, contemplation et illumination, par la puissance de l’Esprit Saint.
III. Presque tous, se basant sur la parole du Christ qui précède immédiatement le récit de la Transfiguration «En vérité, je vous le dis, il y a quelques-uns parmi ceux qui se tiennent ici qui ne goûteront pas la mort jusqu’à ce qu’ils eussent vu le Fils de l’homme venant dans son Royaume» mettent la Transfiguration dans un certain rapport avec la vision de la vie éternelle.
3- La liturgie aussi le dit
Dans les textes de la liturgie des heures du rite byzantin[10] il est dit que, lors de la transfiguration, la nature humaine retrouve sa splendeur première: « retrouve la beauté de l’image première » et « tu as fait que la nature d’Adam redevienne brillante (resplendissante) rendant sa nature à la gloire et à la splendeur de ta divinité » (apostichon des Vêpres). Un peu comme ce que dit saint Paul au sujet de la résurrection et de l’ascension. En Christ, vous êtes ressuscités avec lui et vous êtes assis à la droite du Père.
L’affirmation de la liturgie est claire: ce qu’ils contemplent c’est la divinité du Christ (et non la redondance de celle-ci (sur son corps et ses vêtements)). C’est ce que Grégoire Palamas dira avec insistance. Il se posera la question: quelle lumière les Apôtres ont-ils contemplée? Est-elle créée ou incréée? Il affirmera toujours qu’elle est incréée.
Notons une chose: saint Matthieu est le seul à comparer le visage du Christ au Soleil (cf. 17,2). Mais il a pour l’être humain (les justes) une expression similaire: « Alors les justes resplendiront comme le Soleil dans le Royaume de leur Père » (Mt 13,43). Cela est frappant!
Il est clair que c’est de l’intérieur qu’il porte ses disciples, qu’il les élève, pour qu’ils soient rendus capables de le contempler tel qu’il est. Il élève leur humanité, leur capacité. Il était en prière: comme Séraphim de Sarov. Par sa prière il attire ses disciples vers l’intérieur. Son feu les transforme. Il est solidaire de ses disciples en tant qu’il est homme. Son humanité pendant sa prière devient la leur, il va par son humanité attraper leur humanité, il l’élève, la rend capable de le contempler. Il les divinise. Sa prière est éminemment apostolique.
Marie le voit constamment transfiguré. « Grand, Yahvé, et louable hautement dans la ville (Marie, dans la nuée) de notre Dieu » (Ps 48,2). Elle voit le Dieu en lui. Oui tu es vraiment un Dieu caché (Is 45,15). Elle lui a donné la chair et volontairement il a voulu par cette chair (la femme qui couvre l’homme[11]) « cacher » (protéger, préserver de l’œil curieux et impur) et « révéler » sa divinité.
- Alen fait noter que la transfiguration de Jésus correspond à ce qui dans Jean est exprimé par la possession continuelle de la doxa de la part de Jésus, même si Luc est le seul à utiliser l’expression doxa[12]. Oui dans la transfiguration se trouve la promesse que l’Eglise brillera comme la lumière comme sa Tête (Cf. Préface dans la Messe de rite latin[13]). Quand apparaît le Christ nous sommes semblables à lui car nous le voyons tel qu’il est (les temps dans l’original sont au futur) (Cf. antienne de communion latine[14]).
4- La « Nuée-Parole prononcée »
Dans la transfiguration nous avons trois niveaux d’action: il y a les vêtements du Christ, il y a son visage et puis il y a la « nuée-parole prononcée ». Par conséquent tout dans l’homme est pris mais chaque niveau reçoit selon sa capacité. Le corps de l’être humain est pris/influencé par la transformation des vêtements du Seigneur, son âme par l’aspect de son visage, et enfin, son esprit, est pris par cette action d’ombre que provoque la venue de la Nuée – action d’ailleurs combinée avec le Père qui prononce son Fils[15].
Le corps
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L’âme
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L’esprit
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transfiguration (gloire)
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transfiguration (gloire) |
obombration (nuée) |
« ses vêtements devinrent d’une blancheur éclatante » |
« l’aspect de son visage devint autre » |
« Une nuée advint et elle les prenait sous son ombre. Celui-ce est mon Fils, l’Elu: écoutez-le! »
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L’esprit participe à l’Engendrement du Verbe: « Lumière née de la Lumière, vrai Dieu né du Vrai Dieu »
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Quelle différence y a t’il entre la gloire qu’ils ont vue sur les vêtements et sur le visage et l’obombration! La gloire n’a pu les aveugler, ni surpasser les autres lumières: ils voyaient distinctement aussi les deux hommes avec lui, ils les distinguaient. Ce n’est donc pas la gloire du Verbe qu’ils ont vus, ce n’est pas sa Divinité. Par contre l’obombration et cette parole que le Père prononce en eux c’est cela la profonde participation à la nature divine du Verbe. Qu’a de commun la divinité du Verbe, la participation à sa divinité et ce que l’âme et le corps peuvent ressentir! C’est pourquoi, l’Esprit Saint dit: « il ne savait pas ce qu’il disait » et ensuite: « et quand advint la voix, Jésus se trouva seul (rien de commun) ».
5- La Transfiguration est vision
Oui, la Transfiguration est en fait une vision. Et les trois passages qui la décrivent dans les synoptiques font une inclusion sur la question de la vision: ils commencent le récit par la mention de la vision et ils le terminent aussi par une seconde mention de la vision!
Lisons les textes et notons, en rouge, l’inclusion:
Matthieu 17
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Marc 9 |
Luc 9 |
En vérité je vous le dis: il en est d’ici présents qui ne goûteront pas la mort avant d’avoir vu le Fils de l’homme venant avec son Royaume. | Et il leur disait: « En vérité je vous le dis, il en est d’ici présents qui ne goûteront pas la mort avant d’avoir vu le Royaume de Dieu venu avec puissance. » | « Je vous le dis vraiment, il en est de présents ici même qui ne goûteront pas la mort, avant d’avoir vu le Royaume de Dieu. » |
1 Six jours après, Jésus prend avec lui Pierre, Jacques, et Jean son frère, et les emmène, à l’écart, sur une haute montagne. | Six jours après, Jésus prend avec lui Pierre, Jacques et Jean et les emmène seuls, à l’écart, sur une haute montagne.
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Or il advint, environ huit jours après ces paroles, que, prenant avec lui Pierre, Jean et Jacques, il gravit la montagne pour prier.
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2 Et il fut transfiguré devant eux: son visage resplendit comme le soleil,
et ses vêtements devinrent blancs comme la lumière. |
Et il fut transfiguré devant eux
et ses vêtements devinrent resplendissants, d’une telle blancheur qu’aucun foulon sur terre ne peut blanchir de la sorte. |
Et il advint, comme il priait, que l’aspect de son visage devint autre,
et son vêtement, d’une blancheur fulgurante. |
3 Et voici que leur apparurent Moïse et Elie, qui s’entretenaient avec lui. | Elie leur apparut avec Moïse et ils s’entretenaient avec Jésus. | Et voici que deux hommes s’entretenaient avec lui: c’étaient Moïse et Elie qui, apparus en gloire, parlaient de son exode, qu’il allait accomplir à Jérusalem. |
4 Pierre alors, prenant la parole, dit à Jésus: « Seigneur, il est heureux que nous soyons ici; si tu le veux, je vais faire ici trois tentes, une pour toi, une pour Moïse et une pour Elie. » | Alors Pierre, prenant la parole, dit à Jésus: « Rabbi, il est heureux que nous soyons ici; faisons donc trois tentes, une pour toi, une pour Moïse et une pour Elie. » C’est qu’il ne savait que répondre, car ils étaient saisis de frayeur. | Pierre et ses compagnons étaient accablés de sommeil. S’étant bien réveillés, ils virent sa gloire [[16]] et les deux hommes qui se tenaient avec lui. Et il advint, comme ceux-ci se séparaient de lui, que Pierre dit à Jésus: « Maître, il est heureux que nous soyons ici; faisons donc trois tentes, une pour toi, une pour Moïse et une pour Elie »: il ne savait. |
5 Comme il parlait encore, voici qu’une nuée lumineuse les prit sous son ombre, | Et une nuée survint qui les prit sous son ombre, | Et pendant qu’il disait cela, survint une nuée qui les prenait sous son ombre et ils furent saisis de peur en entrant dans la nuée. |
6 et voici qu’une voix disait de la nuée: « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, qui a toute ma faveur, écoutez-le. » | et une voix partit de la nuée: « Celui-ci est mon Fils bien-aimé; écoutez-le. » | Et une voix partit de la nuée, qui disait: « Celui-ci est mon Fils, l’Elu, écoutez-le. » |
7 A cette voix, les disciples tombèrent sur leurs faces, tout effrayés. Mais Jésus, s’approchant, les toucha et leur dit: « Relevez-vous, et n’ayez pas peur. » | ||
8 Et eux, levant les yeux, ne virent plus personne que lui, Jésus, seul. | Soudain, regardant autour d’eux, ils ne virent plus personne, que Jésus seul avec eux. | Et quand la voix eut retenti, Jésus se trouva seul. |
9 Comme ils descendaient de la montagne, Jésus leur donna cet ordre: « Ne parlez à personne de cette vision, avant que le Fils de l’homme ne ressuscite d’entre les morts ». | Comme ils descendaient de la montagne, il leur ordonna de ne raconter à personne ce qu’ils avaient vu, si ce n’est quand le Fils de l’homme serait ressuscité d’entre les morts. | |
10 | Ils gardèrent la recommandation, tout en se demandant entre eux ce que signifiait « ressusciter d’entre les morts. | Pour eux, ils gardèrent le silence et ne rapportèrent rien à personne, en ces jours-là, de ce qu’ils avaient vu. |
Dans la Transfiguration il y a donc vraiment une vision. Le Christ lui-même prophétise cette vision quelques jours avant. C’est pour cela que le récit de la Transfiguration commence ainsi: « six/huit jours après »! Après quoi? Après cette promesse du Christ: « Je vous le dis vraiment, il en est de présents ici même qui ne goûteront pas la mort, avant d’avoir vu le Royaume de Dieu. » Ce qui fait que la Transfiguration est la réalisation, texto, de cette promesse: « voir le Royaume de Dieu« . Oui, elle est fondamentalement une vision. Et le cœur de cette vision est cette Nuée qui les prend sous son ombre, afin de réaliser cette vision!
6- L’obombration, centre de la Transfiguration
Oui, le cœur de cette vision est l’événement de la venue de la Nuée qui prend sous son ombre tous ceux qui sont présents! C’est un acte clair et fort d’obombration! C’est ceci l’aspect le plus profond de la Transfiguration. Les disciples sont pris sous l’Ombre de la Nuée (l’Esprit Saint).
5 Comme il parlait encore, voici qu’une nuée lumineuse les prit sous son ombre, |
Et une nuée survint qui les prit sous son ombre, | Et pendant qu’il disait cela, survint une nuée qui les prenait sous son ombre et ils furent saisis de peur en entrant dans la nuée. |
6 et voici qu’une voix disait de la nuée: « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, qui a toute ma faveur, écoutez-le. » | et une voix partit de la nuée: « Celui-ci est mon Fils bien-aimé; écoutez-le. » | Et une voix partit de la nuée, qui disait: « Celui-ci est mon Fils, l’Elu, écoutez-le. » |
7 A cette voix, les disciples tombèrent sur leurs faces, tout effrayés. Mais Jésus, s’approchant, les toucha et leur dit: « Relevez-vous, et n’ayez pas peur. » |
C’est donc une vision très profonde qui leur est donnée, vision de la nature divine! Par conséquent, la peur les prend, l’unification de tout leur être et de toute leur perception autour du Christ seul a lieu (notons la mention « Jésus seul » à la fin de la vision). C’est le cœur de la Transfiguration. On s’arrête souvent à la question du changement d’aspect du visage du Christ et de ses vêtements, mais ceci n’est pas la transfiguration! Celle-ci a lieu quand les disciples sont pris sous l’ombre de la nuée. Notons aussi le parallèle mystérieux avec l’action de l’Esprit en Marie lors de l’Annonciation: « L’Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre; c’est pourquoi l’être saint qui naîtra sera appelé Fils de Dieu. » (Lc 1,35)
Le centre de la transfiguration est l’événement de l’obombration, qui atteint les profondeurs des apôtres, et non le changement survenu dans les vêtements et dans le visage du Seigneur! La venue de la Nuée (l’Esprit Saint) qui prend sous son ombre est l’événement essentiel de la Transfiguration. Dieu prend les disciples sous son ombre – comme il a fait avec Marie pour l’Incarnation[17]!
7- Ouvrir la voie à la vision
Une question importante se pose: Comment le Seigneur ouvre-t-il la voie à cette vision? Après la profession de foi de Pierre[18] (profession inspirée par Dieu et qui révèle la véritable identité de Jésus), le Seigneur lui-même annonce, pour la première fois sa Passion et sa Mort ainsi qui les exigences pour le suivre: « se renier soi-même », « perdre sa vie », mourir à soi pour lui. Voyons d’abord le texte:
A dater de ce jour, Jésus commença de montrer à ses disciples qu’il lui fallait s’en aller à Jérusalem, y souffrir beaucoup de la part des anciens, des grands prêtres et des scribes, être tué et, le troisième jour, ressusciter. | Et il commença de leur enseigner: « Le Fils de l’homme doit beaucoup souffrir, être rejeté par les anciens, les grands prêtres et les scribes, être tué et, après trois jours, ressusciter; et c’est ouvertement qu’il disait ces choses. | « Le Fils de l’homme, dit-il, doit souffrir beaucoup, être rejeté par les anciens, les grands prêtres et les scribes, être tué et, le troisième jour, ressusciter. »
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Pierre, le tirant à lui, se mit à le morigéner en disant: « Dieu t’en préserve, Seigneur! Non, cela ne t’arrivera point! » Mais lui, se retournant, dit à Pierre: « Passe derrière moi, Satan! tu me fais obstacle, car tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes! » | Pierre, le tirant à lui, se mit à le morigéner. Mais lui, se retournant et voyant ses disciples, admonesta Pierre et dit: « Passe derrière moi, Satan! car tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes! »
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Alors Jésus dit à ses disciples: « Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il se renie lui-même, qu’il se charge de sa croix, et qu’il me suive.
Qui veut en effet sauver sa vie la perdra, mais qui perdra sa vie à cause de moi la trouvera. Que servira-t-il donc à l’homme de gagner le monde entier, s’il ruine sa propre vie? Ou que pourra donner l’homme en échange de sa propre vie? |
Appelant à lui la foule en même temps que ses disciples, il leur dit: « Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il se renie lui-même, qu’il se charge de sa croix, et qu’il me suive.
Qui veut en effet sauver sa vie la perdra, mais qui perdra sa vie à cause de moi et de l’Evangile la sauvera. Que sert donc à l’homme de gagner le monde entier, s’il ruine sa propre vie? Et que peut donner l’homme en échange de sa propre vie? |
Et il disait à tous: « Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il se renie lui-même, qu’il se charge de sa croix chaque jour, et qu’il me suive.
Qui veut en effet sauver sa vie la perdra, mais qui perdra sa vie à cause de moi, celui-là la sauvera. Que sert donc à l’homme de gagner le monde entier, s’il se perd ou se ruine lui-même? |
« C’est qu’en effet le Fils de l’homme doit venir dans la gloire de son Père, avec ses anges, et alors il rendra à chacun selon sa conduite. | Car celui qui aura rougi de moi et de mes paroles dans cette génération adultère et pécheresse, le Fils de l’homme aussi rougira de lui, quand il viendra dans la gloire de son Père avec les saints anges. » | Car celui qui aura rougi de moi et de mes paroles, de celui-là le Fils de l’homme rougira, lorsqu’il viendra dans sa gloire et dans celle du Père et des saints anges. |
En vérité je vous le dis: il en est d’ici présents qui ne goûteront pas la mort avant d’avoir vu le Fils de l’homme venant avec son Royaume. | Et il leur disait: « En vérité je vous le dis, il en est d’ici présents qui ne goûteront pas la mort avant d’avoir vu le Royaume de Dieu venu avec puissance. » | « Je vous le dis vraiment, il en est de présents ici même qui ne goûteront pas la mort, avant d’avoir vu le Royaume de Dieu. » |
Comme « récompense » pour cette détermination de le suivre on peut voir le Royaume. En fait c’est bien plus qu’une « récompense », c’est un mécanisme interne: on se donne (ce qui revient, dans les mécanismes profonds de notre être, à actionner la poignée de la porte de notre cœur) alors Dieu peut entrer et se donner à nous! Se donner, c’est tout donner, mourir à soi, mettre sa vie entre les mains de Dieu, toute sa vie! Une manière de rendre vivant le baptême!
Donc, « sauver sa vie » (qui est une conséquence selon le Christ du don de soi) et « voir le Royaume » c’est tout un, ou encore, c’est la condition sine qua non pour voir le Royaume. La Transfiguration est comme la réalisation de l’union, la Vision intellectuelle de l’union (cf sainte Thérèse de Jésus 7D) après la Nuit de purification de l’esprit, qui est la participation à la Passion et à la Mort du Seigneur. C’est pour cela d’ailleurs qu’ils ne devaient – ni ne pouvaient – parler de la Transfiguration que dans la lumière de la Résurrection, qui vient après la participation à la passion (c’est à dire de la purification majeure: passage du mode humain au mode divin de suivre le Christ!)
On voit donc le lien qui existe entre se donner, perdre sa vie, et la promesse qui en découle: voir le Royaume de Dieu! Ceux qui vraiment s’engagent, et se donnent tout entiers à Dieu (dans leur état de vie), eh bien, Dieu se donne à eux et ils peuvent voir le Royaume, dès ici-bas. Car se donner, tout donner, est en fait agir en toute pureté, mettre Dieu à la première place, Dieu premier servi. Et cette pureté permet de voir Dieu, selon la promesse: les cœurs purs verront Dieu!
8- La relation synoptique
Les Evangiles synoptiques sont les trois premiers et ils ont la caractéristique de marcher ensemble de manière presque parallèle. Ils ont donc la même ossature. Dans les synoptiques nous avons des variations et des ajouts. Leur présence nous explique en partie la raison d’être de trois versions si proches entre elles et pourtant, parfois divergentes. La variation entre les versions c’est quand nous avons des éléments différents d’égale valence dans différentes versions. Cela signifie en général qu’il ne faut pas accorder trop d’importance à ce genre de différences. Un ajout consistant est la présence d’une information unique mais ayant un poids notable pour la signification du passage. Cela signifie: « n’oublie pas que cela est inclus implicitement dans le sens chez les autres et que c’est quelque chose d’évident ». Cela provient de la conviction que l’Ecriture explique l’Ecriture. Exemple: dans saint, Luc, Moïse et Elie parlent de l’exode du Seigneur. Or le contexte dans lequel est placée la Transfiguration nous montre qu’elle est comme le fruit de la participation à la mort et à la résurrection du Seigneur. C’est en fait quelque chose d’explicite mais Dieu – Auteur des 3 synoptiques – nous le rappelle par cet ajout. On risque de séparer la Transfiguration du cadre dans lequel elle se situe, de l’intelligence profonde qu’on devrait en avoir.
9- Intermède: saint Thomas
« Le Seigneur, après avoir annoncé sa passion à ses disciples les avait engagés à suivre sa passion. Or, pour que quelqu’un marche avec assurance sur une route, il faut qu’il connaisse plus ou moins par avance le but du voyage, de même que l’archer ne lance pas bien la flèche s’il n’a pas vu la cible qu’il faut viser. C’est ainsi que Thomas disait (Jn 14,5): « Seigneur, nous ne savons pas ou tu vas: comment pourrions-nous connaître le chemin? » Et cela est particulièrement nécessaire quand la voie est difficile et escarpée, le trajet pénible, et la fin joyeuse.
Or le Christ par sa passion est parvenu à obtenir la gloire non seulement de l’âme, gloire qu’il avait depuis le premier instant de sa conception, mais aussi du corps, comme il l’a dit (Lc 24,26) : « Il fallait que le Christ souffrit cela et entrât ainsi dans sa gloire. » C’est à elle qu’il conduit ceux qui suivent les traces de sa passion, selon la parole de S. Paul: « Il nous faut traverser bien des épreuves pour entrer dans le Royaume des cieux » (Ac 14,21). Et c’est pourquoi il convenait qu’il montre à ses disciples sa gloire lumineuse, qui est sa transfiguration, à laquelle il configurera les siens, selon l’épître aux Philippiens (Ph 3,24) « Il transfigurera notre corps de misère pour le conformer à son corps de gloire. » Si bien que Bède déclare : « Il a pourvu dans sa bonté à ce que ses disciples, ayant goûté peu de temps la contemplation de la joie définitive, soient capables de supporter plus courageusement l’adversité. » « (Q 45 a.1 resp.)
10- Transfiguration et Passion
La fête de la Transfiguration nous rappelle ce désir que nous avons de creuser encore plus la question de Dieu, ce qu’il est, « la ténèbre » incommensurable. Cette aspiration constante et lancinante vers l’infini ténébreux de Dieu. La liturgie orientale ainsi que sa théologie semblent plus porteuses vers cette direction. Nous ne nions pas l’existence des mystiques occidentaux qui ont évoqué l’apophatisme, mais nous sentons plus dans la liturgie et la théologie orientales cela. C’est comme ça, c’est peut-être un peu subjectif. Mais il y a du vrai.
En lisant certains passages sur l’économie de Dieu, l’enveloppement[19] qu’il effectue pour entrer en contact avec l’être humain, nous trouvons cela tout à fait grand. Il tient compte de la distance infinie qui existe entre lui et nous. Il enveloppe son être divin, il se cache pour « tempérer » sa divinité. Quelle admirable économie! Et la Croix, n’est-ce pas là le sommet de son économie? n’est-ce pas là qu’il s’approche le plus de nous qui sommes morts et loin de Dieu? S’approcher du pécheur, épouser le pécheur qui est loin de Dieu, entrer dans ce lieu « noir », ce néant, cette distance, cette perte!!! Quelle démarche étonnante de la part de Dieu!!! Il a fait cela car il est venu chercher celui qui était perdu. Il est nécessaire qu’il aille dans les lieux de perdition. Il est nécessaire qu’il se perde. Il a fait tout cela par amour, par fidélité à lui-même. Ne rien laisser se perdre, parcourir plus s’il le faut, ne pas éteindre la mèche fumante. L’éternité d’une personne ça se joue sur un rien, un grain de sénevé. Quels risques, quelle patience!
Pourquoi, lors de la Transfiguration, – qui est un moment intense de prière – Jésus parle avec Moïse et Elie de son Exode? Il « est aux affaires du Père »; « le Père travaille ». Et ce travail c’est de « sauver » ce qui est perdu. Aller à la recherche de ce qui est perdu. Nous avons comme l’impression qu’il y a une autre lumière dans le mystère de la Transfiguration. Nous pouvons dire que le mystère de la prière du Christ et le mystère de sa Transfiguration sont une même chose. La différence c’est que lors de cette prière-là qu’on a nommé après: « Transfiguration », les apôtres étaient présents. Mais on peut dire que d’habitude cela se passait ainsi. Il était familier d’Abraham (qui exultât), de David, de Moïse, d’Elie et des prophètes. Mais c’est pas le fait d’être familier avec eux qui nous intéresse, c’est le fait de découvrir le contenu de sa prière, et c’est son exode qu’il allait accomplir à Jérusalem[20]. Jésus, dans l’Evangile de Luc, est invariablement rivé au soucis de la Rédemption, à l’exode, au passage, à la sortie qu’il doit accomplir (effectivement dans plusieurs passages de son Evangile nous trouvons des allusions à la question: il regarde en face la montée à Jérusalem. Celle-ci joue un rôle fondamental dans cet Evangile. De plus à la fin de S. Luc, il dit bien: « esprits lents à comprendre tout ce qu’ont annoncés Moïse, David et les prophètes » (il en était familier et c’était le cœur de sa prière)). C’est le cœur de sa prière. Il est venu accomplir la volonté du Père, et c’est le salut. Pourquoi imaginer une gloire autre dans la prière de Jésus??
La tradition occidentale particulièrement aime à dire que le Christ avait voulu montrer sa gloire à ses disciples afin qu’ils puissent supporter la passion. On lie ainsi gloire et passion. Mais saint Luc semble suggérer bien plus: il semble dire que dans sa gloire, il parlait de son exode; comme si c’était la même lumière. Saint Jean en parlant de la passion parle d’une glorification, montrer sa gloire. Comme si c’était sur la Croix que la Transfiguration avait lieu, que sur la Croix, Dieu se montrait le plus. C’est là qu’il est le plus proche de l’être humain, et c’est là donc qu’il est le plus lui-même, le plus brillant. Dieu ouvre son Cœur et se révèle au maximum sur la Croix. « L’abîme appelle l’abîme ». La ténèbre de l’homme est éclairée par la Ténèbre de l’Etre infini de Dieu. La rencontre, le contact se font. Alors obligatoirement ce contact a toute l’apparence de la mort, mais c’est parce que c’est la Vie qui la met en relief pour la première fois. Le Néant de l’absence de Dieu est exploré, pénétré par Dieu.
C’est pas étranger à la Transfiguration de penser à l’économie de Dieu. C’est pas étranger. Pour sauver l’humanité, pour parler de l’Exode qu’il doit faire à Jérusalem il fallait bien qu’il pense à l’économie de Dieu, au ténèbres de l’homme. C’est la fête de l’échange aussi: entre gloire et néant, comme pour la Croix!
11- « Nous sommes transfigurés »
Nous sommes frappés par cette phrase: « Et nous tous qui, le visage découvert, réfléchissons comme en un miroir la gloire du Seigneur, nous sommes transformés (« métamorphosés », « transfigurés », le même mot utilisé pour la transfiguration au sujet du Christ en Mt 7,2) en cette même image [le Christ est l’image du Père], allant de gloire en gloire, comme de par le Seigneur, qui est Esprit » (2Co 3 fin) car elle me renvoie à l’explication que donnent les pères grecs de la transfiguration. C’est nous qui sommes transfigurés en Christ! C’est l’Esprit Saint qui nous fait voir le Christ! « Le Seigneur a lui-même brillé dans nos cœurs pour faire resplendir la connaissance de sa gloire qui rayonne sur le visage du Christ! » Quelles paroles puissantes! Oui, c’est notre transfiguration que le Christ est venu opérer en nous, il est venu nous redonner la ressemblance perdue, et nous façonner à son image! Lui qui est image du Père. Le Christ, gravit la montagne, transfigurant les apôtres, leur permettant ainsi de le voir tel qu’il est. Le passage de saint Paul est la clef d’interprétation des pères! En fait, l’Esprit nous permet de voir resplendir la gloire du Christ, lui qui est l’image de Dieu! Les paroles de saint Paul sont claires! « Qui regarde vers lui resplendira » dit le psaume 38. Les pères n’ont donc rien inventé! Il y a nécessité d’être transformés en Christ, dans noter profondeur, afin de pouvoir le voire!
12- La montée est un changement de modalité
Dans la Transfiguration nous avons l’indication claire de la nécessité de changer de modalité de connaissance et d’amour afin de pouvoir voir et participer à la divinité du Christ! Voyons les expressions utilisées par les Evangélistes pour signifier la montée!
1 Six jours après, Jésus prend avec lui Pierre, Jacques, et Jean son frère, et les emmène, à l’écart, sur une haute montagne. | Six jours après, Jésus prend avec lui Pierre, Jacques et Jean et les emmène seuls, à l’écart, sur une haute montagne. | Or il advint, environ huit jours après ces paroles, que, prenant avec lui Pierre, Jean et Jacques, il gravit la montagne pour prier. |
« les emmène, à l’écart, sur une haute montagne » (Mt et Mc). C’est le Christ qui emmène! Il élève la capacité des disciples! Il change leur manière de connaître et d’aimer (c’est pour cela d’ailleurs qu’il leur demande de ne pas parler de l’événement avant sa passion et résurrection, car c’est par la passion et la résurrection que la modalité des apôtres va se changer en divine! C’est en ayant cette modalité qu’ils pourront comprendre, saisir, voir! Pas avant! Tandis que Matthieu et Marc s’accordent sur ces 3 points, Luc résume ainsi: « il gravit la montagne pour prier ». Pour lui, c’est le mystère de la prière qui va se révéler ici. Non que le Christ avait besoin de prier, mais pour nous apprendre à prier! Prier en fait c’est entrer dans la vie intime de la Trinité, c’est entrer dans cette circulation divine! Et pour cela, il faut qu’on y soit introduits! « Nul ne connaît le Père si ce n’est le Fils, et celui à qui le Fils veut bien le révéler » (Mt 11,27). Le Fils a voulu se révéler aux apôtres, il a alors ouvert leurs yeux intérieurs, il les a ressuscités avant l’heure dans une comportement d’homme nouveau, ayant des facultés intérieures nouvelles: des yeux, une ouïe, un cœur, etc…!
Etre au dessus de la haute montagne et être admis dans la Nuée sainte, voilà les signes de la modalité divine. Seul Dieu peut nous aider à le voir! C’est pas ta lumière que nous voyons la Lumière! C’est par le Christ qui est Lumière né de la Lumière que nous pouvons voir Dieu.
Le Fils nous purifie, purifie notre cœur afin que nous soyons rendus capables de voir Dieu, vois sa divinité!
La vallée est la modalité humaine, et le sommet de la montagne, dans la Nuée sainte, c’est la modalité divine!
13- Marie, la Nuée sainte!
Marie la Pleine de grâce est la Nuée de Dieu, toute pétrie de l’Esprit Saint, dans laquelle on peut voir le vrai Christ, sa Divinité! C’est en elle qu’on le trouve en plénitude. Cela est tout le fonctionnement de la révélation tel qu’il est expliqué par la liturgie Orientale mais aussi par l’Ecole Française de spiritualité, surtout par Jean Jacques Olier. C’est dans la Nuée, Marie, que nous pouvons trouver et voir le Christ. C’est par ses yeux à elle qu’on peut le connaître tel qu’il est et par son cœur qu’on peut l’aimer avec son Amour à Lui! Elle est comme l’incarnation de la modalité divine, et elle nous est donnée afin que par elle et en elle nous parvenions à la plénitude de notre foi, la Montagne qu’est le Christ.
Marie est celle qui a contenu dans son sein Celui que les Cieux ne peuvent contenir comme le dit la liturgie! Elle est la toute pure, et donc, elle contemple Dieu en Jésus, constamment, et depuis le premier instant de l’union du Verbe avec la nature humaine dans son sein! Car la béatitude: « heureux les cœurs purs car ils verront Dieu » s’applique à la Pleine de Grâce de manière justement plénière!
Elle est la porte du Ciel mais aussi la demeure du Très Haut! Elle fait plus que simplement montrer le Christ, elle nous donne ses yeux et son cœur pour le voir et l’aimer, non pas avec notre modalité même la meilleure, mais bien avec la modalité divine qui est la présence de l’Esprit Saint en elle!
14- La transfiguration: mystère de la prière
Dans la tradition orientale, les mystères de la transfiguration et celui de la prière sont en fait tout un! Quand on approfondit ce que disent les pères grecs à propos de la Transfiguration on comprend combien les deux mystères sont profondément liés! La Transfiguration résume en elle-même tout le mystère de la prière! Elle donne à la prière son authentique horizon: celui de la contemplation de Dieu lui-même!
La prière est une montée, et une entrée dans la Nuée divine! La prière avec un cœur purifié est une vision de Dieu!
L’oraison, ou prière du cœur, consiste en fait à « tendre » ou, si on y est, « à demeurer » dans la contemplation de la gloire du Christ. C’est l’office céleste des élus!
15- La transfiguration Icône première
Quand un iconographe commence sa mission d’écrire[21] des icônes, il s’attèle à la Première Icône, ou plus exactement à l’Icône Première: la Transfiguration. Elle est l’Icône de la manifestation de la Lumière Incréée. Or tout son travail d’iconographe a trait à la Lumière. En toute icône il laissera filtrer la Lumière de Celui qui est la Lumière éternelle.
Il va donc, dès le début de sa vocation, droit au but, et contemple la lumière. Il lui faut lui-même d’abord monter, à l’écart, sur la haute montagne de la contemplation pure, afin d’être rendu capable de voir Dieu. Il lui faut probablement des années de silence où il finira par entendre, dans un cœur pur, le Père prononcer son Fils en lui. C’est à partir de ce moment-là que la Lumière l’aura habilité à la voir et ainsi à l’exprimer par une Icône! Ce qu’il peut désormais contempler, il reçoit la grâce de l’exprimer.
16- Dieu lui-même fait resplendir en nos cœurs la connaissance de sa gloire
Où a lieu la Transfiguration pour nous? Elle a lieu dans notre cœur, c’est le fait de parvenir à l’union d’amour et à la contemplation de Dieu au fond de notre cœur! Dieu transfigure notre être progressivement afin de nous rendre capables de « voir » la Gloire du Fils unique, qui fait sa demeure en nous!
17- La frayeur due à la rencontre du divin
Lors de la manifestation essentielle de la Nuée et de la Parole du Père, les apôtres tombent par terre et sont très effrayés! C’est la première fois qu’ils voient la divinité. Leur frayeur est très grande! Le divin tel qu’il est, transcendant, provoque la frayeur, car il est absolument « tout autre »! Et ce caractère « tout-autre » déstabilise! Devoir se déraciner se la modalité humaine et enraciner son être dans le ciel, dans la modalité divine!
La première rencontre avec la ténèbre divine a pour effet de provoquer dans la nature humaine trop basse, un très grande frayeur! Seuls ceux qui en ont l’expérience peuvent le comprendre! La Sainteté de Dieu est un seuil absolument autre posé à la perception humaine!
18- « et nous avons contemplé sa gloire » (Jn 1,14)
Quelques points importants qui touche notre foi émergent de l’événement de la Transfiguration. Nous avons dit que c’est une vision. Pierre et Jean évoquent cet événement dans leurs écrits! Voyons d’abord le texte de saint Pierre:
« Car ce n’est pas en suivant des fables sophistiquées que nous vous avons fait connaître la puissance et l’Avènement de notre Seigneur Jésus Christ, mais après avoir été témoins oculaires de sa majesté. Il reçut en effet de Dieu le Père honneur et gloire, lorsque la Gloire pleine de majesté lui transmit une telle parole: « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, qui a toute ma faveur. » Cette voix, nous, nous l’avons entendue; elle venait du Ciel, nous étions avec lui sur la montagne sainte.
Ainsi nous tenons plus ferme la parole prophétique: vous faites bien de la regarder, comme une lampe qui brille dans un lieu obscur, jusqu’à ce que le jour commence à poindre et que l’Astre du matin se lève dans vos cœurs. » (2P 1,16-19)
C’est un texte très dense qu’il est bon de voir de plus près!
Tout d’abord nous pouvons noter que saint Pierre précise que la base de sa prédication est la vision qu’il a eue du Christ! Ce n’est pas une connaissance intellectuelle, ou une foi obscure, c’est tout simplement, et rien de moins, qu’une vision qui est à la base de sa prédication! Il a vu la Gloire du Christ!
D’une certaine manière c’est aussi la même dynamique pour saint Paul: le Christ lui apparaît et c’est cette vision et bien d’autres qui sont la base de sa prédication, lui qui n’a jamais vu le Christ en chair et en os. Ce qui est bien important pour nous, car nous non plus nous n’avons pas vu le Christ en chair et en os! Ceci veut dire que ce que l’on cherche à comprendre ici dans le mécanisme du témoignage nous touche à nous aussi et non pas uniquement la première génération des apôtres.
Ce qui fait qu’on ne peut être prédicateur du Christ si on n’a pas vu sa gloire! Ce que l’on voit, c’est cela dont est témoin! Ce qui fut le cas du Christ qui est notre exemple et notre chemin. Il témoigne de ce qu’il a vu!
On a tendance souvent à donner au mot « témoignage » le sens d’ « expérience »: on témoigne de ce que l’on a ressenti, expérimenté, de la présence et de l’action de Dieu dans notre vie! Or le témoignage est en fait bien plus qu’une simple expérience, il est une vision! D’ailleurs le premier des martyrs, pour être martyr (c’est à dire « témoin ») voit le Fils de l’homme dans sa gloire! « Tout rempli de l’Esprit Saint, il fixa son regard vers le ciel; il vit alors la gloire de Dieu et Jésus debout à la droite de Dieu. « Ah! dit-il, je vois les cieux ouverts et le Fils de l’homme debout à la droite de Dieu. » (Ac 7,55-56)
C’est aussi le même fonctionnement que l’on trouve chez saint Jean! « Et le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous, et nous avons contemplé sa gloire, gloire qu’il tient de son Père comme Fils unique, plein de grâce et de vérité. » (Jn 1,14)[22] Il semble que dans ce verset saint Jean se réfère à la Transfiguration, lui qui a été témoin de la Gloire du Seigneur! « et nous avons contemplé sa gloire »… et c’est le Père qui l’a glorifié sur le Thabor: « gloire qu’il tient de son Père, comme Fils unique, plein de grâce et de vérité ». C’est vraiment l’écho de l’événement de la Transfiguration! C’est ce que saint Pierre dit à sa manière: « Il reçut en effet de Dieu le Père honneur et gloire » sur la Montagne sainte!
Et Pierre ne se contente pas de dire qu’il a vu la Gloire du Seigneur, il estime que nous sommes nous aussi appelés à voir cette Gloire: « Car sa divine puissance nous a donné tout ce qui concerne la vie et la piété: elle nous a fait connaître Celui qui nous a appelés par sa propre gloire et vertu. Par elles, les précieuses, les plus grandes promesses nous ont été données, afin que vous deveniez ainsi participants de la divine nature, vous étant arrachés à la corruption qui est dans le monde, dans la convoitise. » (2P 1,3-4) « Ainsi nous tenons plus ferme la parole prophétique: vous faites bien de la regarder, comme une lampe qui brille dans un lieu obscur, jusqu’à ce que le jour commence à poindre et que l’Astre du matin se lève dans vos cœurs. » (2P 1,16-19) C’est là le point crucial et qui est une leçon importante. La vision de la Gloire du Christ fait partie du cheminement commun de la vie chrétienne. Ce n’est pas une chance exceptionnelle que certains privilégiés ont eue mais bien la voie commune. Saint Paul, lui aussi, lui qui n’a pas connu le Christ en chair et en os dit aussi la même chose: « En effet le Dieu qui a dit: « Que des ténèbres resplendisse la lumière », est Celui qui a resplendi dans nos cœurs, pour faire briller la connaissance de la gloire de Dieu, qui est sur la face du Christ. » (2 Co 4,6) On ne peut avoir de paroles plus claires!
La Transfiguration n’est pas une grâce extraordinaire données à des privilégiés, mais bien partie intégrante de la croissance spirituelle qui fait que l’on fini un jour par être rendu capable de voir Dieu dans notre cœur.
La montée, seuls, à l’écart, sur une haute montagne, tant d’éléments et d’indications donnés au début du récit de la Transfiguration, indications qui en fait renvoient à notre être profond. Il s’agit de monter en nous-mêmes, de nous élever, jusqu’à arriver au sommet de la montagne (notre cœur) là où règne uniquement la Gloire de Dieu.
Saint Paul précise l’objet de sa prédication: « nous annonçons ce que l’œil n’a pas vu, ce que l’oreille n’a pas entendu, ce qui n’est pas monté au cœur de l’homme, tout ce que Dieu a préparé pour ceux qui l’aiment. Car c’est à nous que Dieu l’a révélé par l’Esprit. » (1 Co 2,9-10)
Portons donc nos yeux vers notre Dieu qui est au centre de nous-mêmes, au fonde de nous-mêmes, vers la chambre nuptiale que l’Epoux habite. C’est là qu’il est, là qu’il fait briller toute sa gloire. C’est là notre demeure, c’est vers ce lieu que tendent tous nos efforts! Il s’agit de voir au dedans la Gloire du Fils! C’est cela l’union à Dieu! Il s’agit d’arriver au sommet de la montagne, c’est à dire vers la chambre nuptiale au fond de nous-mêmes. Les visions d’Etienne, de Daniel, d’Ezéchiel, de Jean sont toutes des visions situées au dedans d’eux-mêmes, au plus profond d’eux mêmes, plus profond que là où ils sont, et plus haut que là où ils sont! Et pourtant au dedans! C’est cela la réalisation, c’est cela le véritable Ciel, le Ciel commencé dès ici-bas.
19- Entrée dans la Trinité
Nous avons besoin de contempler la beauté du Premier Commandement: « Ecoute, Israël: Yahvé notre Dieu est le seul Yahvé. Tu aimeras Yahvé ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton pouvoir. Que ces paroles que je te dicte aujourd’hui restent dans ton cœur! » Aimer, entrer dans la circulation divine!
La Transfiguration est une élévation et une entrée dans un fonctionnement différent! Je m’explique! D’abord « élévation »: montée sur un lieu élevé, purification. Ensuite, la venue de la Nuée et la Parole prononcée par le Père est en fait « l’introduction » de l’être humain dans la circulation Trinitaire. C’est une participation à la vie Trinitaire. L’homme ne connaît plus par sa propre capacité, mais par celle de Dieu, et n’aime plus par sa propre force mais par Dieu lui-même. L’homme participe aux opérations Trinitaires!
La Transfiguration est une entrée dans la Trinité. Dans ce sens, il ne faut plus quitter le sommet de cette montagne, il faut y tendre et y demeurer!
20- Transfiguration et Traversée
Le Christ en prenant ses disciples, à l’écart, vers cette haute montagne, en fait les fait traverser le Lac (de Génésareth) qui sépare l’homme du Trois fois Saint! Notons que la traversée nocturne porte la trace d’éléments semblables à ceux de la Transfiguration. Le Christ congédie les foules, il donne l’ordre aux disciples de traverser, et ensuite il va sur la montagne seul, prier! Et les disciples, le voyant venir comme un fantôme – pensons à la Venue du Royaume (venue intérieure) -, ont peur (rencontre avec le sacré)! Combien de similitudes entre les deux événements: Transfiguration et Traversée du Lac! En fait, c’est une même chose, mais décrite différemment!
Mt 14
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Mc 6 |
Jn 6 |
22 Et aussitôt il obligea les disciples à monter dans la barque et à le devancer sur l’autre rive, pendant qu’il renverrait les foules. 23 Et quand il eut renvoyé les foules, il gravit la montagne, à l’écart, pour prier.
Le soir venu, il était là, seul. 24 La barque, elle, se trouvait déjà éloignée de la terre de plusieurs stades, harcelée par les vagues, car le vent était contraire. 25 A la quatrième veille de la nuit, il vint vers eux en marchant sur la mer. 26 Les disciples, le voyant marcher sur la mer, furent troublés: « C’est un fantôme », disaient-ils, et pris de peur ils se mirent à crier. 27 Mais aussitôt Jésus leur parla en disant: « Ayez confiance, c’est moi, soyez sans crainte. » 28 Sur quoi, Pierre lui répondit: « Seigneur, si c’est bien toi, donne-moi l’ordre de venir à toi sur les eaux » – 29 « Viens », dit Jésus. Et Pierre, descendant de la barque, se mit à marcher sur les eaux et vint vers Jésus. 30 Mais, voyant le vent, il prit peur et, commençant à couler, il s’écria: « Seigneur, sauve-moi! » 31 Aussitôt Jésus tendit la main et le saisit, en lui disant: « Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté? » 32 Et quand ils furent montés dans la barque, le vent tomba. 33 Ceux qui étaient dans la barque se prosternèrent devant lui, en disant: « Vraiment, tu es Fils de Dieu! » |
45 Et aussitôt il obligea ses disciples à monter dans la barque et à prendre les devants vers Bethsaïde, pendant que lui-même renverrait la foule. 46 Et quand il les eut congédiés, il s’en alla dans la montagne pour prier.
47 Le soir venu, la barque était au milieu de la mer, et lui, seul, à terre. 48 Les voyant s’épuiser à ramer, car le vent leur était contraire, vers la quatrième veille de la nuit il vient vers eux en marchant sur la mer, et il allait les dépasser. 49 Ceux-ci, le voyant marcher sur la mer, crurent que c’était un fantôme et poussèrent des cris; 50 car tous le virent et furent troublés. Mais lui aussitôt leur parla et leur dit: « Ayez confiance, c’est moi, soyez sans crainte. » 51 Puis il monta auprès d’eux dans la barque et le vent tomba. Et ils étaient intérieurement au comble de la stupeur, 52 car ils n’avaient pas compris le miracle des pains, mais leur esprit était bouché. |
rendant compte qu’ils allaient venir s’emparer de lui pour le faire roi, s’enfuit à nouveau dans la montagne, tout seul.
16 Quand le soir fut venu, ses disciples descendirent à la mer, 17 et, montant en bateau, ils se rendaient de l’autre côté de la mer à Capharnaüm. Il faisait déjà nuit, Jésus n’était pas encore venu les rejoindre; 18 et la mer, comme soufflait un grand vent, se soulevait. 19 Ils avaient ramé environ 25 ou 30 stades, quand ils voient Jésus marcher sur la mer et s’approcher du bateau. Ils eurent peur. 20 Mais il leur dit: « C’est moi. N’ayez pas peur. » 21 Ils étaient disposés à le prendre dans le bateau, mais aussitôt le bateau toucha terre là où ils se r endaient |
Le but de la vie chrétienne est en fait d’entrer dans cette Nuée, et d’y rester, ou encore de marcher sur les eaux de la Trinité! Par le fonctionnement à modalité divine, l’être humain est appelé à « marcher sur les eaux », c’est à dire être au dessus de la modalité humaine (les eaux). C’est Dieu qui donne ce fonctionnement nouveau!
Le lien avec la multiplication des pains est clair. Manger le Pain, c’est à dire le Christ, permet de demeurer en lui et lui en nous! Ce qui fait que ceci nous permet de fonctionner selon sa modalité à lui et donc c’est l’équivalent de marcher sur les eaux! La barque ou la marche sur les eaux c’est tout un. La barque c’est le Christ lui-même, car ayant mangé sa chair et bu son sang, on entre en Lui et Lui en nous! C’est donc comme entrer dans la barque. Et la barque c’est la modalité divine! Marcher sur les eaux c’est être élevés au dessus de la mer, de pas se laisser enfoncer dans la modalité humaine! Tenir, demeurer en Lui!
21- Transfiguration et Cantique des Cantiques
L’action de la Nuée lumineuse, celle de prendre les apôtres sous son ombre, est en fait une introduction dans le Cellier intérieur, la Chambre nuptiale: le Cœur du Christ! L’éclairage réciproque entre la Transfiguration et le Cantique des Cantiques est instructif! Voilà ce que dit l’Epouse et que l’on pourrait entendre de la bouche des apôtres sur la Montagne, ayant été introduits dans la Nuée Lumineuse: « le Roi m’a introduite en ses appartements … » Admise dans secret le plus profond de l’être de son Epoux divin, l’épouse peut alors voir sa divinité, la beauté de la divinité: « Que tu es beau, mon Bien Aimé, combien délicieux » (1,16) Elle peut la goûter: « Tes amours sont plus délicieuses que le vin » (1,2) et y demeurer: « A son ombre désirée, je me suis assise… » (2,3) De fait, il s’appartiennent l’un l’autre dans une étreinte divine: « Il est à moi et moi à lui… » (2,16)
22- « Jésus seul »
Nous notons facilement une remarque important que ne manquent pas de signaler les trois synoptiques! Après la Parole du Père, Jésus seul est là. Ils ne voient plus rien d’autre! Bien sûr il est fait en premier lieu allusion à la disparition de Moïse et d’Elie! Peut-être aussi de la Nuée et du Père! Jésus seul est là! Mais cette remarque va plus loin! Car il est évident que quand tout cessera, les disciples ne verront plus rien d’autre! Mais ils insiste pour dire, que c’est Jésus qui est là, et qu’il est seul! Jésus est le Tout, et tout est en lui, tout le crée et toute la divinité réside en lui en plénitude! La Transfiguration, élevant les disciples et les introduisant dans une nouvelle modalité de fonctionnement, celle de l’homme nouveau, eh bien montre l’effet de l’action de Dieu. Elle unifie les puissances de l’âme et ses sens internes! Ainsi on ne voit plus que Jésus.
8 Et eux, levant les yeux, ne virent plus personne que lui, Jésus, seul. | Soudain, regardant autour d’eux, ils ne virent plus personne, que Jésus seul avec eux. | Et quand la voix eut retenti, Jésus se trouva seul. |
Par ailleurs, notons que les Paroles du Père dites à partir de la Nuée Lumineuse orientent l’attention des apôtres vers le Christ. Le Père lui-même dit aux Apôtres la Divinité du Fils! Ils n’ont pas à se tourner vers qui que ce soit pour le connaître, Moïse et Elie perdent tout poids face au Christ! « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, qui a toute ma faveur, écoutez-le. » Le Père se complait totalement dans le Fils! C’est une autre manière de dire les paroles de saint Paul aux Colossiens: « la plénitude de la divinité réside en Lui »! Ici c’est le Père qui le dit! Le Père opère ainsi dans les apôtre un changement profond, il les enracine dans les profondeurs mêmes du mécanisme de la révélation, il les branche dans le Fils! C’est la base de la prédication évangélique! Ecoutez-le, il est Dieu, je vous le dis, je me complais totalement en Lui, je suis en Lui, totalement! Pour cela, Jésus seul demeure à la fin! Toute autre lumière ou moyen de révélation (Moïse et Elie) son éclipsés! C’est pour cela que Pierre dans sa lettre[23] où il évoque la Transfiguration estime qu’elle est la base de sa prédication! La base de toute la Révélation c’est le Fils, Parole éternelle du Père!
La Transfiguration assoit la prédication apostolique sur le témoignage même du Père! Le Père montre la Gloire du Fils! C’est le Père qui parle du Fils! On ne peut avoir quelque chose de plus élevé, de plus sûr! C’est un moment essentiel de la prédication apostolique! Il reçut en effet de Dieu le Père honneur et gloire, lorsque la Gloire pleine de majesté lui transmit une telle parole: » Il reçut en effet de Dieu le Père honneur et gloire, lorsque la Gloire pleine de majesté lui transmit une telle parole: « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, qui a toute ma faveur. » Cette voix, nous, nous l’avons entendue; elle venait du Ciel, nous étions avec lui sur la montagne sainte « (2P 1,17-18) Notons bien que le Père donne honneur et gloire au Fils devant les Apôtres! Le Père témoigne du Fils auprès des Apôtres! C’est ce que Jean dit de manière plus ramassée dans son Prologue: « nous avons contemplé sa gloire, gloire qu’il tient de son Père comme Fils unique, plein de grâce et de vérité » (Jn 1,14). « nous avons contemplé sa gloire » sur le Mont Thabor!
23- Transfiguration et Eucharistie
Le Corps que nous recevons à l’Eucharistie c’est le Corps du Christ ressuscité et « siégeant » au Ciel à la droite du Père! C’est aussi le Corps de Marie qui « siège » à ses côtés au Ciel! C’est le même Corps que nous avons dans chaque Messe! Nous ne le voyons pas car nos yeux ne sont pas transfigurés, mais ce Corps est déjà glorieux, lumineux!! C’est cela qui est curieux! Cela fait 2000 ans que nous recevons ce Corps, que nous l’avons parmi nous et nous n’arrivons pas à le voir tel qu’il est: Transfiguré, Glorieux! C’est cela le message de la Transfiguration: nous sommes appelés à être transfigurés afin que les yeux de notre cœur soient rendus capables de voir le Corps du Christ tel qu’il est!
24- Conclusion: Transfiguration et vie spirituelle
Ce qui nous intéresse au premier chef est la relation qui existe entre l’événement de la Transfiguration et notre vie spirituelle! La Transfiguration a été considérée par la tradition orientale comme capitale pour la vie spirituelle et pour la vie de prière.
Nous avons parcouru plusieurs points qui touchent différents aspects de la Transfiguration! Nous avons pu voir son lien avec la vie spirituelle. De là nous pouvons presque tirer une théologie de la prière et de la vie spirituelle! La richesse de cet événement ainsi que ses ramifications éclairent la vie spirituelle d’une lumière unique et nécessaire. De fait la Transfiguration nous dit que le but de notre vie spirituelle est la vision de l’essence divine: « heureux les cœurs purs car ils verront Dieu! » Elle nous dit aussi que cette vision est pour la vie terrestre qui est le début de la vie divine: « il en est parmi vous qui ne mourront pas sans voir le Royaume de Dieu! » Elle nous dit que c’est à nous de changer afin d’entrer dans ce Royaume; c’est de notre transfiguration qu’il s’agit! Pour cela elle évoque une montée, une purification, un changement de modalité! Elle nous montre les 3 niveaux du don de Dieu: don au corps, à l’âme et esprit! Trois modalités différentes du Don de Dieu pour nous! Elle nous centre sur le Christ (« mon Bien Aimé », « en qui je me complais » (je demeure en plénitude), « écoutez-le », « Jésus seul ») comme étant le cœur de notre vie et la Montagne véritable à escalader et à habiter! Elle nous dévoile ce qui se passe sur la Croix (« il parlait de son Exode »): l’union du Christ avec chacun de nous!
Tous ces éléments de théologie spirituelle nous sont indiqués par la Transfiguration! Sa richesse est inépuisable et sa lumière est la Lumière Eternelle et Incréée: Dieu.
Jean Khoury
Londres, 6 Août 2003
Nouvelles lumières sur la Transfiguration
Voici d’autres lumières sur la Transfiguration, qui corroborent ce qui a déjà été vu! Le texte de cette année est celui de l’Evangile de saint Luc.
« Je vous le dis vraiment, il en est de présents ici même qui ne goûteront pas la mort, avant d’avoir vu le Royaume de Dieu. Or il advint, environ huit jours après ces paroles, que, prenant avec lui Pierre, Jean et Jacques, il gravit la montagne pour prier. Et il advint, comme il priait, que l’aspect de son visage devint autre, et son vêtement, d’une blancheur fulgurante. Et voici que deux hommes s’entretenaient avec lui: c’étaient Moïse et Elie qui, apparus en gloire, parlaient de son départ, qu’il allait accomplir à Jérusalem. Pierre et ses compagnons étaient accablés de sommeil. S’étant bien réveillés, ils virent sa gloire et les deux hommes qui se tenaient avec lui. Et il advint, comme ceux-ci se séparaient de lui, que Pierre dit à Jésus: « Maître, il est heureux que nous soyons ici; faisons donc trois tentes, une pour toi, une pour Moïse et une pour Elie »: il ne savait ce qu’il disait. Et pendant qu’il disait cela, survint une Nuée qui les prenait sous son ombre et ils furent saisis de peur en entrant dans la nuée. Et une voix partit de la Nuée, qui disait: « Celui-ci est mon Fils, l’Elu, écoutez-le. » Et quand la voix eut retenti, Jésus se trouva seul. Pour eux, ils gardèrent le silence et ne rapportèrent rien à personne, en ces jours-là, de ce qu’ils avaient vu. » (Lc 9,27-36)
Il y a une promesse que Jésus formule, et 7 jours après (en fait 6 dans Mt et Mc et 8 chez Luc), elle se réalise. Les sept jours c’est quoi? C’est la création et ici, c’est la re-création. Donc entre la promesse et sa réalisation il y a toute la transformation que l’on subit et qui fait que nous allons être rendus capables de « voir » Dieu ou le Royaume, d’y entrer. Il nous faut « sept jours », sept étapes, (pensons aux sept demeures) pour être créés à nouveau dans le Christ. Saint Paul parle bien de la créature nouvelle! Nous sommes des une création nouvelle dans le Christ!
La promesse est faite pour « avant la mort »! Et elle est faite pour assurer les disciples: « en vérité », tellement cette vérité-promesse est importante.
Le texte entend apprendre à prier. Ils sont montés sur la montagne « pour prier ». C’est pour cela que les pères grecs disent que tout le mystère de la prière est inclus dans la Transfiguration, c’est pour cela aussi que l’Iconographe contemplatif, commence sa mission par écrire cette Icône.
« Et il advint, comme il priait » il est le seul à prier bien qu’en fait, il les a pris là-haut pour prier. Ils ne prient pas, ils le voient prier! Ils sont donc « en dehors » de la prière! Toute la Transfiguration est une initiation donnée aux apôtres pour les introduire dans le mystère de la Prière.
Ils arrivent à voir distinctement: Le visage de Jésus, ses vêtements, ainsi que Moïse et Elie, apparus en gloire. Les yeux du corps voient les vêtements, les yeux de l’âme voient la gloire du Visage du Christ, de Moïse et d’Elie, mais nous sommes encore dans la multiplicité, capables de distinguer plusieurs choses: le visage, les vêtements, Moïse, Elie. Ils ne sont pas encore entrés dans la prière profonde, celle qui dissout la multiplicité. De fait, Pierre va déclarer à haute voix ce qu’il perçoit, le monde du multiple: « »Maître, il est heureux que nous soyons ici; faisons donc trois tentes, une pour toi, une pour Moïse et une pour Elie »: il ne savait ce qu’il disait. » Indirectement, Pierre est entrain de dire qu’il n’est pas « dans la prière ». La prière ne peut se faire dans le monde des apparences, même les plus « glorieuses » (visions): vêtements, visage etc….
« Et pendant qu’il disait cela, survint une nuée qui les prenait sous son ombre et ils furent saisis de peur en entrant dans la nuée. » Voilà que la prière véritable commence. Ils sont introduits sous la nuée, c’est à dire sous l’Esprit Saint, qui les introduit dans le Christ, qui les fait participer aux opérations de la Trinité. Il faut entrer dans le Fils, dans ses profondeurs, sous la Nuée, pour l’Eternité. On voit aussi clairement le parallèle avec l’Annonciation: l’Esprit vient, le Père couvre Marie, le Fils naît en elle!
Du monde de la division et des fantômes nous entrons dans le monde unifié du Fils, nous entrons « en Lui ». Nous entrons dans la Tente de la Rencontre, dans le Temple, dans le vrai Temple: le Christ. On entre dans l’Unique Orant (il est le seul à prier au début de la Transfiguration)!
La Vision qui constitue la Transfiguration: « Et pendant qu’il disait cela, survint une Nuée qui les prenait sous son ombre et ils furent saisis de peur en entrant dans la Nuée. Et une voix partit de la Nuée, qui disait: « Celui-ci est mon Fils, l’Elu, écoutez-le. » » Entrés dans la Nuée, ils sont en fait dans le Christ qui est l’Unique Tente de rencontre avec Dieu le Père. Ils se trouvent donc dans un Lieu unique. Alors le Père explique ce qu’est ce Lieu: « Celui-ci est mon Fils ». Dans la Tente de la Rencontre ainsi que dans le Temple de Jérusalem, la présence de Dieu est symbolisée par la Nuée qui vient. Cependant, quand elle est présente on ne peut y entrer pour officier.
» Moïse le fit. Il fit tout comme Yahvé l’avait ordonné. Le premier jour du premier mois de la seconde année, on dressa la Demeure. Moïse dressa la Demeure […] Ainsi Moïse termina les travaux. La Nuée couvrit la Tente du Rendez-vous, et la gloire de Yahvé emplit la Demeure. Moïse ne put entrer dans la Tente du Rendez-vous, car la nuée demeurait sur elle, et la gloire de Yahvé emplissait la Demeure. » (Ex 40,16-35)
« Or quand les prêtres sortirent du Sanctuaire, la Nuée remplit le Temple de Yahvé et les prêtres ne purent pas continuer leur fonction, à cause de la Nuée: la gloire de Yahvé remplissait le Temple de Yahvé! Alors Salomon dit: « Yahvé a décidé d’habiter la Nuée obscure. Oui, je t’ai construit une demeure princière, une résidence où tu habites à jamais. » (1 Roi 8,10-13)
Par contre, dans le cas de la Transfiguration, nous avons la véritable Tente de la Rencontre, le Véritable Temple de Dieu: le Christ, qui, habité par la Nuée, nous introduit cependant en Lui! Avant cela n’était point possible. La Nuée empêchait tout être humain d’entrer dans la Tente ou dans le Temple comme nous le lisons dans les textes qui précèdent! Avec le Christ, la porte s’ouvre pour que l’on puisse accéder, en lui, directement à Dieu. Cette expérience du divin fait peur car le contact direct avec la transcendance du 3 fois Saint, impressionne: la distance entre son être et le nôtre fait sentir tout son poids. Devant la nouveauté de cette expérience, le Père prend la peine d’expliquer ce qu’est ce « lieu » dans lequel ils se trouvent: « Celui-ci » ou encore « ceci » « est mon Fils »! c’est à dire: ce que vous expérimentez là, cette entrée dans la Nuée, c’est en fait entrer dans mon Fils! Cela est désormais possible, c’est même ce qui constitue la Nouvelle Alliance, le nouveau culte qu’on me rend, le culte « en Esprit et en Vérité », c’est à dire, dans la Nuée (l’Esprit) et dans la Vérité (le Fils).
Cette expérience, ce qu’ils voient, est une vision, la vision de Dieu lui-même! Escalader la montagne, être recréé en 7 jours[24], ceci fait de nous des êtres au cœur pur, or les cœurs purs voient Dieu.
Autre remarque: Ils sont invités par Jésus à prier – ce qui suppose de parler, de dire une prière, de dire quelque chose à Dieu – et voilà que le Père leur demande par contre d’écouter. Laisser le Père prononcer son Fils en nous! Il n’a pas d’autre parole à dire! Tout est compris dans cette Parole! Toutes les paroles de Vie sont dans cette Parole.
Entrer en Dieu: 1- Dans la Nuée, c’est à dire, dans l’Esprit, pour Ecouter (en fait recevoir du Père) le Père dire en nous son Fils. 2- Dans le Fils né en nous, aimer (spirer l’Esprit) le Père.
Ce que l’on voit alors est vu par l’Esprit, œil de l’âme. Ce que l’on voit c’est Dieu lui-même! Sa nature Incréée, la lumière incréée.
La puissance efficace de la Voix du Père réalise l’union entre chacun des apôtres et Jésus! « Et quand la voix eut retenti, Jésus se trouva seul. » Le « Jésus seul », renvoie à l’absence de la multiplicité! On commence le récit avec Jésus seul comme Priant (il est le seul Orant, le Seul qui peut prier. Car seul le Fils connaît le Père, Seul le Fils est face au Père, seul le Fils homme est dans la Trinité) et on finit le récit l’ayant lui, seul, mais cette fois-ci étant nous-mêmes entrés en Lui!
Donc pour prier, il nous faut entrer dans la Nuée, dans l’Esprit Saint, afin de pouvoir écouter le Père dire son Fils en nous! Entrer dans la Nuée c’est entrer dans le Fils qui prie le Père!
Transfiguration et Lectio
La lectio, où l’on doit écouter le Fils nous parler, ne peut avoir lieu que « dans la Nuée », dans l’Esprit Saint, on ne peut écouter que « dans l’Esprit Saint ».
Londres, le 6 Août 2004
Copyright Jean KHOURY Reproduction interdite.
Notes:
[1] Réflexions prises de Georges Habra, « La Transfiguration selon les Pères Grecs », Paris, 1974, pp. 44-48.
[2] «lumière d’en haut», «lumière spirituelle», «lumière inaccessible et éternelle».
[3] «gloire convenant à l’essence divine», «gloire invisible et inaccessible à toute nature créée», «gloire naturelle», «gloire de la divinité invisible».
[4] «les resplendissements et la splendeur de la divinité», «resplendissement d’une manière qui dépasse toute essence».
[5] «le Beau véritable, qui dépasse toute compréhension et puissance humaine, et contemplé par l’intelligence seule».
[6] «divinité qui est contemplée et intelligible», «triomphe de la divinité sur la pauvre chair», «la divinité manifestant ses rayons».
[7] «forme principale», «forme divine».
[8] «théophanie visible et intelligible».
[9] «puissance du Père», «puissance mise à nu», «la puissance et la gloire de Dieu absolument insaisissable à tous les êtres».
[10] Kondakion de l’Avant-fête de la Transfiguration: « En ce jour par la divine Transfiguration le genre humain tout entier resplendit divinement, s’écriant plein de joie: Le Christ se transfigure, sauvant le monde entier. »
[11] « Car YHWH crée du nouveau dans le pays: la femme entoure l’homme. » (Jr 31,22)
[12] Cf. Dizionariio dei concetti biblici del nuovo testamento, p. 813.
[13] « il laissait transparaître en sa chair la clarté dont resplendira le corps de son Église ».
[14] « Quand le Christ apparaîtra, nous serons semblables à lui, parce que nous le verrons tel qu’il est. » (1 Jn 3,2)
[15] « Le Père qui prononce son Fils » est une manière ramassée de rendre compte de cet aspect très profond de la Transfiguration. La première opération de la Trinité est le Père qui engendre de toute éternité le Fils! Et au moment de la transfiguration le Père dit: « celui-ci est mon Fils bien aimé ». De fait, le Fils est toute la pensée du Père (« Au Commencement était la Parole et la Parole était Dieu »), toute sa parole. Le Père le prononce de toute éternité! Et il aimerait le prononcer en nous, nous faire participer à cette opération d’engendrement du Verbe. C’est pour cela qu’il dit de manière humaine: « écoutez-le », mais en fait, c’est le Père qui demande notre attention afin qu’il puisse prononcer son Fils en nous! L’écoute, dans sa forme la plus profonde, est en fait une participation à cette opération du Père, une participation, dans notre esprit, de l’Engendrement du Verbe!
[16] Luc est le seul à signaler le fait que (pour ce qui est du visage, des vêtements et de l’apparition de Moïse et d’Elie) les Apôtres virent la gloire du Christ: « s’étant bien réveillés, ils virent sa gloire ». Ce qui pourrait détourner notre attention de l’essentiel de la vision – surtout qu’il semble bien insister qu’ils étaient bien réveillés! De fait Mt et Mc ne signalent pas du tout la vision de la gloire à ce moment. Cela dit, Luc prend bien le soin de dire que lorsque la Nuée les prend sous son ombre ils furent saisis de peur: car c’est à ce moment qu’a lieu la vision la plus profonde, le contact le plus direct avec la Divinité: « ils furent saisis de peur en entrant dans la nuée ».
[17] Oui, de fait l’Annonciation est elle aussi un événement Trinitaire: « L’Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre; c’est pourquoi l’être saint qui naîtra sera appelé Fils de Dieu. » (Luc 1,35)
[18] Elle se situe avant la Transfiguration.
[19] Expression prise de John Henry Newman. Il est le théologien du « développement » homogène de la doctrine chrétienne à travers les âges. Ce développement est une croissance dans notre compréhension du contenu de la foi chrétienne. Mais « développement » du côté humain suppose aussi « enveloppement » de la part de Dieu qui ne révèle pas tout d’emblée!
[20] Au début de sa passion il dit bien: « j’ai désiré de désir manger cette Pâques avec vous » (Luc)!
[21] On ne dit pas « peindre » une Icône, mais « écrire » une icône car en fait l’Icône est un langage théologique, une manière théologique d’exprimer le mystère contempler. Chaque « élément » de l’Icône est comme une phrase, une expression d’un aspect du mystère!
[22] Il redit la même chose dans sa première lettre: « Ce qui était dès le commencement, ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous avons contemplé, ce que nos mains ont touché du Verbe de vie; – car la Vie s’est manifestée: nous l’avons vue, nous en rendons témoignage et nous vous annonçons cette Vie éternelle, qui était tournée vers le Père et qui nous est apparue – ce que nous avons vu et entendu, nous vous l’annonçons, afin que vous aussi soyez en communion avec nous. Quant à notre communion, elle est avec le Père et avec son Fils Jésus Christ. » (1Jn 1,1-4)
[23] « Ce n’est pas en suivant des fables sophistiquées que nous vous avons fait connaître la puissance et l’Avènement de notre Seigneur Jésus Christ, mais après avoir été témoins oculaires de sa Majesté. » (2 P1,16)
[24] En fait c’est soit 6 jours, ceux de la création soit 8 jours, en faisant allusion au huitième jour qui est celui de la Résurrection.